NELLYRODI


nelly rodi

PIERRE-FRANCOIS LE LOUËT

Président de NellyRodi


S’il y a une définition du bon goût, elle se rapproche du bien, ce qui fait du bien aux gens.Pour moi le bon goût aujourd’hui n’est pas une question d’esthétique, ni une question de règles de société, mais il est lié à ce qui est bon pour la société, à ce qui porte ses valeurs.


Photo de gauche à droite Philippe Florentin et Pierre-François Le Louët

BG : NellyRodi est fondée en 1985 par votre mère, quelle est sa vocation?
PFL: NellyRodi est le nom de jeune fille de ma mère. En 1985 elle crée un bureau de style, c’est-à-dire une société très centrée sur l’analyse des tendances, des formes, des couleurs, des matières, avec la volonté de les mettre en perspective avec l’évolution des modes de consommation et des mouvements sociétaux. Elle a fortement contribué au développement des industries créatives en analysant et en expliquant l’incidence de ces tendances, qu’elle a essaimées dans le monde entier. Elle est devenue une personnalité emblématique de ce milieu.
BG : Vous rejoignez la société et en prenez la présidence en 2003, comment s’est passée la transition?

PFL: Sans jamais renier les valeurs créatives de la société, ni le travail sur les cahiers de tendances qui contribuent toujours au succès de NellyRodi, nous avons développé l’activité de conseil.
BG : Quel est le positionnement de NellyRodi aujourd’hui ?
PFL: Nous sommes un cabinet de conseil en stratégie de marques. Notre travail consiste à imaginer l’avenir des industries créatives, dans la mode, la beauté, le design, la culture, l’hospitalité, la food, avec des clients qui vont de Netflix au Louvre, en passant par les Domaines de Fontenille, les plus grandes marques du luxe et de la cosmétique ou la grande distribution. Nous sommes présents à Paris, New York et Tokyo.
BG : Pourquoi une Maison vient-elle vous voir?

PFL: Parce qu’elle s’interroge sur le comportement d’achat de ses clients. Pour rester pertinente et désirable, en comprenant et en analysant l’évolution des tendances de consommation. Il y a un grand basculement dans les comportements d’achat des clients, dans les usages, dans les références culturelles. Au-delà d’une plateforme de marque, il faut comprendre les attentes des clients, analyser leurs modes de consommation. Faire évoluer l’offre à la fois dans sa nature et son mode d’actualisation, les services, l’expérience. Il faut revoir le positionnement, le discours, le territoire, actualiser l’histoire de la marque . Comment se projeter demain, au rythme des réseaux sociaux qui sont devenus indispensables pour s’inscrire dans la modernité ?
BG : Dans le secteur de la mode, où NellyRodi est très présent, pouviez-vous prévoir la chute de certaines enseignes qui faisaient partie de notre paysage, comme NafNaf, Kookaï, Camaïeu...?
PFL: La mode est souvent le premier secteur impacté par les transformations sociétales et il a un effet d’annonce pour d’autres secteurs de l’économie. Beaucoup de marques sont restées ancrées dans un modèle des années 80/90, très centré sur le retail et le nombre de m2 des magasins. Aveuglés par cette course à la taille, beaucoup de dirigeants n’ont pas vu les transformations dans les usages de consommation. Ils n’ont pas compris assez tôt la révolution du digital, les attentes environnementales et l’arrivée de nouveaux concurrents avec des positionnements affirmés. Il y a eu de véritables tremblements de terre dans le discount notamment, qui propose aussi une véritable expérience. Shein vend plus de 5 milliards de vêtements chaque année.
« La seconde main » dans l’habillement, avec notamment Vinted, est passée d’1 à 8 milliards de chiffre d’affaires entre 2018 et aujourd’hui. Des enseignes comme celles du groupe Beaumanoir ont très bien réussi leur transformation. Dans le premium, des marques comme Bash, Maje ou Sandro se portent très bien. Sur le segment du luxe abordable de nouvelles marques parisiennes comme « Ami » ou «Jacquemus » sont apparues et connaissent un fort développement. Le luxe continue sa progression. Toutes ces marques ont grignoté des parts de marché aux marques milieu de gamme qui n’ont pas su se réinventer. On a l’impression que tout s’effondre dans la mode, alors que du bas de gamme au luxe, de nombreuses marques s’en sortent très bien.
BG : Peut-on définir une recette du succès pour garder le cap?
PFL: La vraie question c’est comment rester désirable? Comment ne pas vieillir avec ses clients et se renouveler pour séduire les jeunes générations en répondant à leurs aspirations? Je pense qu’il faut être très clair sur son offre et son positionnement et sur la clientèle que l’on veut toucher et celle que l’on ne veut pas. J’ai un souvenir extraordinaire quand nous avons travaillé avec le Chef Alain Senderens, il y a une quinzaine d’années, lorsqu’il a décidé de « rendre ses 3 étoiles Michelin ». Il voulait repenser sa cuisine pour être plus accessible, avec des plats plus simples comme les sardines et avec moins d’apparat. Il ne voulait plus cuisiner pour une clientèle irrespectueuse sous prétexte du prix payé . Senderens a ouvert les yeux au monde de la restauration sur les évolutions que la clientèle attendait, il a été inspirant pour la bistronomie. Nous l’avons accompagné et avons recréé un lieu magique, plus lisible de cette évolution, avec le designer Noé Duchaufour Lawrance qui su respecter les valeurs historiques de ce décor classé. Le succès a été fulgurant.
Il y a un tel décalage entre les jeunes générations multiculturelles et les générations conservatrices, qu’il est essentiel de trouver sa propre histoire et de l’exprimer clairement, pour rester désirables et connectés avec ses clients. Et puis, il faut être de plus en plus soucieux de l’expérience opérationnelle que vont vivre les clients, notamment à travers le service. C’est vrai dans la restauration, l’hôtellerie, comme dans la coiffure, où les attentes ont considérablement évolué et les problèmes de personnel sont très importants.
NellyRodi

Carnet de Tendances Printemps-été 2025

NellyRodi

Pierre-François Le Louët - Président de NellyRodi

NellyRodi

Carnet de Tendances Printemps-été 2025

BG : L’expérience client est dans la bouche de tous les responsables marketing!

PFL: Elle se vit évidemment au travers de l’offre, du décor, de l’environnement, de choses très concrètes, mais elle passe aussi par quelque chose de moins palpable, de l’ordre de la relation, avec le personnel, l’accueil, le sourire, la gentillesse, les attentions.. Ce sont souvent ces choses simples, humaines, qui donnent le sentiment d’être bien reçu, d’être reconnu et qui donneront envie de revenir. On travaille souvent pour des marques qui souhaitent définir leur territoire esthétique pour créer des produits dérivés, qui sont aujourd’hui des preuves d’un passage, le souvenir d’un moment et incarnent un établissement.
BG : Qu’est ce que le bon goût pour vous, est-ce légitime y compris comme titre d’un magazine?


PFL: Oui je trouve cela aussi légitime que le mauvais goût.
Je suis sûr que l’on pourrait créer un magazine à succès qui s’appellerait Mauvais Goût. Pour moi le bon goût aujourd’hui n’est pas une question d’esthétique, ni une question de règles de société, mais il est lié à ce qui est bon pour la société, à ce qui porte ses valeurs. Qu’est-ce qui fait qu’on a envie de rassembler dans un même endroit des personnes extrêmement différentes? Qu’est-ce qui les rassemble? S’il y a une définition du bon goût, elle se rapproche du bien, de ce qui fait du bien aux gens. Le beau et le bon se rapprochent, ils doivent incarner des valeurs contemporaines et correspondre aux styles de vie, à la manière de vivre des gens.
BG : Vous évoquez le mot style de vie, le « life style » est de plus en plus couramment évoqué. Est-ce un phénomène de mode?
PFL: Les styles de vie sont liés aux gens qui vivent, aux valeurs qu’ils portent et auxquelles ils croient. Leurs univers de consommation vont s’incarner dans leurs styles de vie, certains plus émotionnels, d’autres plus clivants. Il y a des grands drivers qui portent la consommation, mais si les valeurs sont immuables, elles peuvent évoluer dans leur expression et c’est ce qui fait que l’on doit actualiser notre vision.
BG : Dans certains secteurs comme l’hôtellerie, il n’est pas simple de se renouveler régulièrement quand on voit le niveau d’investissement dans la décoration par exemple.

PFL: Pour un nouvel entrant, si on cherche à faire la différence, il faut des marqueurs assez forts pour donner envie à la clientèle. Ou alors on est constant dans un modèle et les gens viennent pour cette constance, ils n’ont pas de surprise. La clientèle dépense plus dans l’hospitalité et la food, mais il faut la séduire. Il faut inclure dans son business plan des changements réguliers pour s’adapter aux nouvelles expressions des styles de vie.
BG : Que représente la table aujourd’hui?

PFL: Classiquement la table c’est le lieu où l’on prend ses repas.
Les tendances ont considérablement évolué avec les nouvelles générations. On prend son repas dans son lit, au salon, à la cuisine, derrière sur ordinateur, sur son bureau, la table est devenue un plateau, un sac ou une lunch box. Dans beaucoup d’intérieurs il n’y a plus de salle à manger, ni de table.
Les industriels ont vu ce marché fortement diminuer, comme celui du linge de table. Ils ont dû s’adapter, proposer différentes assises aussi. Les styles de cuisine ont considérablement évolué.
BG : Au-delà du meuble et de son évolution, la table a-t-elle toujours un rôle sociétal ?
PFL: Oui bien sûr, la convivialité, le partage sont très actuels. Mais la table à la française est une hérésie pour certaines populations étrangères. Passer 4 heures à table et déguster un nombre de plats incroyables ne plaît pas à tout le monde. Ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas le faire, mais il faut affirmer et assumer ses choix. Par contre, dans un hôtel qui veut attirer une population internationale, il est important de proposer différentes solutions de restauration.
BG: Êtes-vous un épicurien?

PFL: Oui, énormément. J’adore cuisiner, des plats plutôt traditionnels, bœuf carottes, blanquette, je fais mes confitures. J’adore discuter avec mon boucher. J’apprécie beaucoup la gastronomie française ou japonaise. J’adore découvrir de nouveaux endroits.
BG : Vos vins et votre cuisine préférés?
PFL: Mon plaisir varie beaucoup en fonction du moment, des saisons, des lieux. Je ne peux pas imaginer un été sans boire du rosé ou un hiver sans boire de Bourgogne. J’adore la gastronomie japonaise et certains restaurants japonais à Paris sont des petits paradis. Je citerai « Jin » dans le 1er arrondissement ou le concept store « Irasshai » qui vient d’ouvrir rue du Louvre. Je suis fan des épiceries, des boulangeries ou des pâtisseries japonaises qui ouvrent à Paris, elles sont d’une créativité incroyable. À côté de ça, j’adore Le Coquillage d’Hugo Roellinger à Cancale, qui propose une cuisine d’une délicatesse et d’une modernité extrême dans un décor en symbiose avec le lieu et les éléments. Je suis totalement fan de leurs arts de la table qui associent le vintage breton aux créations contemporaines en verre marin de Lucille Viaud. J’aime aussi vraiment le restaurant gastronomique du Chef Romain Meder au Domaine de Primard. A titre personnel j’aime la cuisine qui dialogue avec son lieu et son terroir.
BG : Quelques adresses d’hôtels?

PFL: Je suis un inconditionnel des Domaines de Fontenille. J’ai découvert cet été le nouveau Domaine de Chalamon à Saint Rémy de Provence, un lieu au charme incroyable au milieu de jardins merveilleux. Les propriétaires sont très investis dans cette Collection d’hôtels et ça se ressent dans le moindre détail de chacun de leurs lieux, un peu comme dans une maison de famille. C’est aussi le cas au Palacio de Seteais à Sintra qui est un des plus beaux endroits du monde. Mais pour moi, dans la catégorie Palace, l’hôtel Okura de Tokyo reste une référence absolue, même après sa reconstruction en 2019 : l’esthétique des années 60, le souci du détail et du service en fait un lieu sans équivalent, une légende vivante comme peut l’être le Ritz à Paris.
BG : Un lieu pour vous ressourcer?

PFL: La Bretagne, le Finistère sud, ce sont mes racines. Prendre un verre de Muscadet avec des bigorneaux au Café de la Cale à Sainte-Marine et regarder passer les bateaux.
BG : Le magazine BONGOUT a-t-il du sens pour vous?

PFL: Il m’évoque de la joie, du plaisir, des souvenirs. Il est diversi é dans ses choix et ses adresses, il me donne envie de découvrir ou redécouvrir des endroits. Et puis j’y retrouve de nombreux clients et ils sourient. C’est de la joie de vivre BONGOUT.
retour menu

Produits frais, livrés
en chronofresh

Paiement sécurisé
Qualité produit
garantie
Service client à votre
écoute